
Never open a book with weather. Elmore Leonard, Ten rules for writing fictions.
Un habitant, bon cultivateur, qui avait su obtenir de sa femme treize enfants de belle venue quoique d’inégale grosseur, vivait avec sa famille dans une maison d’habitant, qui était aussi une drôle de maison, car chaque année durant l’hiver elle flottait sur la neige quarante jours et plus; toutefois le printemps revenu, elle redevenait une maison comme les autres à la place même d’où elle était partie, dans le rang Fontarabie, à Sainte-Ursule de Maskinongé. Cette maison avait deux portes, l’une de devant qui donnait sur le chemin du roi, l’autre de derrière sur la terre de l’habitant. Or un printemps il arriva que le fils aîné de celui-ci, devenu grand, sortit par en arrière et se mit à aider son père, dont il devint par la suite l’héritier. Ce fut la seule fois qu’on usa de cette porte. Les printemps suivant les enfants sortirent par en avant, garçons et filles dans la fleur qui l’un après l’autre prirent le chemin du roi pour aller faire graine ailleurs. À chacun, à chacune l’habitant serrait la main et disait : « Bon voyage, mon pigeon, bon voyage, ma colombe; et revenez me voir au temps des Fêtes, je vous attendrai » p. 123
Jacques Ferron, Le déluge, in Contes, édition intégrale, préface de Victor-Lévy Beaulieu, Hurtubise HMH, collection L’Arbre, 1985, c1968, p 123-124.