Incipit du dernier roman d’Amélie Nothomb : Psychopompe. Une ellipse temporelle qui m’a plu :
Le marchand de tissus vit passer un vol de grues blanches. Émerveillé par leur beauté, il pensa qu’il rêverait de découvrir une étoffe d’une splendeur comparable à leur plumage.
De retour à sa boutique, il reçut la visite d’une cliente mystérieuse. Il s’agissait d’une jeune fille d’une beauté sans précédent. Sa longue chevelure noire était lisse, sa peau étincelait de blancheur, le bout de ses lèvres portait ce trait de rouge qui signale le haut lignage. Cette noblesse trouvait sa confirmation dans les manches de son kimono, qui traînaient jusqu’au sol. L’habit en question arborait le blanc rare des familles élevées.
La jeune fille ne semblait pas se décider pour tel ou tel achat. Le marchand proposa de l’aider. Elle finit par parler, d’une voix d’une douceur étrange :
— Épousez-moi.
Stupéfait, le marchand tenta d’en savoir plus. Qui était-elle ? Pourquoi voulait-elle l’épouser ? Elle se tut avec obstination.
Finalement, l’homme songea qu’il serait absurde de refuser une offre aussi flatteuse, et même s’il n’y comprit rien, il épousa la demoiselle.
Le mariage se déroula sans encombre. Les époux commencèrent leur vie de couple avec sérénité. Tout allait pour le mieux.
Le roman. Celui le plus achevé de Nothomb. Très personnel et tissé autour des figures de la lourdeur et de la légèreté.
Amélie Nothomb, Psychopompe, Albin-Michel, 2023. [Édition numérique]
