Football et temps qui passe

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C’est la coupe du monde de football. Difficile d’y échapper. Bon moment pour relire ce livre de Jean-Philippe Toussaint consacré à sa passion pour le football, mais surtout à la fuite du temps.

Il a du culot, Toussaint, dans l’incipit de son roman en nous invitant à l’oublier, à lire autre chose : Voici un livre qui ne plaira à personne, ni aux intellectuels, qui ne s’intéressent pas au football, ni aux amateurs de football, qui le trouveront trop intellectuel.

Je ne suis pas vraiment un grand amateur de soccer, mais je participe tous les quatre ans à cette Grande Messe Mondiale. Ils me perdent un peu avec la distribution des cartons multicolores, leurs corners, leurs reprises de volée, les avantages respectifs des différents systèmes de jeu (le 4-2-4, le 4-4-2 ou le catenaccio), leurs coups de tête et de boule. La puérilité du monde des adultes. Ils m’agacent énormément, les joueurs, avec leur comédie de la douleur. Mais j’aime regarder les matchs, avec mon copain français qui s’y connaît un tantinet et essaie tant bien que mal de m’expliquer les tenants et aboutissants de la joute. Pour moi, c’est tout simple, il faut juste cadrer le ballon entre les deux poteaux, mystifier le gardien adverse, et espérer que la France l’emporte, parce qu’au rugby – autre fierté nationale de l’Hexagone – ils sont nuls, les Français, et n’arrivent pas à pourrir la Nouvelle-Zélande, à embobiner leurs mythiques hakas.

Vous dire aussi mon profond respect pour le gardien de but au moment du penalty.

Je m’égare. À lire, aussi passionnant que son cycle sur Marie. Intéressante autobiographie qui tourne autour d’un ballon qui fait le tour du monde et de sa vie : il me fallait l’écrire, je ne voulais pas rompre le fil ténu qui me relie encore au monde.

Je fais mine d’écrire sur le football, mais j’écris, comme toujours sur le temps qui passe, sur le corps des femmes, sur l’art (Jeff Koons, Christo, Bacon), sur l’angoisse de la mort et sur l’écriture (voir l’irrésistible chapitre sur la coupe du monde  de 2014 : le combat entre le vice et la vertu).

Il doit être dans tous ses états et en Russie, Toussaint. La Belgique s’est qualifiée pour les quarts de finale et elle livrera bataille aux vilains Brésiliens, avec à leur tête Neymar, le dangereux comédien.

Pouvez-vous m’expliquer comment ils font les joueurs pour ne jamais être décoiffés après avoir tapé sur le ballon avec leur caboche? Brylcreem?

Références :

Jean-Philippe Toussaint: Football, Éditions de Minuit, 2015, (édition numérique)

Peter Handke : L’angoisse du gardien de but au moment du penalty, Folio Gallimard, 1972 (l’original allemand publié en 1970), 153 p.

 

A propos Luc Jodoin

Effleure la surface des choses. Intérêt pour la littérature, la langue, les arts visuels, la sociologie et les enjeux sociaux. Tendance woke. Préfère Madrid à Barcelone.
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