La métaphobie

métaphobie

[À l’instar de L’Oreille tendue, je suis sensible aux petits hasards de la vie, aux accouplements littéraires surtout. Accords de proximité.]

Vendredi dernier, 21 juin 2019, j’achevais la lecture du dernier essai de Mathieu Bock-Côté sur le déclin de notre civilisation.

Un essai de psychologie sociale dans lequel il est question de nombreuses perversions de nos sociétés contemporaines :  «désordre psychique» (p. 33); «effondrement des inhibitions civilisatrices». (p.84); «l’hystérisation des revendications identitaires» (p. 58). Il ne manque que les «ados retardés», mais nous avons la possibilité de lire ses chroniques dans le Journal de Montréal (voir ici, pour l’ado mou du genou, vautré dans une crise d’adolescence politique.). Enfin, je m’égare.

J’enchaîne ensuite avec l’ouvrage de Diane Lamonde : Français québécois : la politisation du débat. Une critique d’un titre de Lionel Meney paru en 1990 : Main basse sur la langue. Idéologie et interventionnisme linguistique au Québec.

Fin de journée, petite pause lecture, je me branche sur Là-haut sur la colline d’Antoine Robitaille pour écouter les commentaires de Benoît Melançon (L’Oreille tendue) autour de la parlure québécoise et française.

Dans l’ordre =>

Mathieu Bock-Côté :

Il [le récit médiatique] revendique non seulement le monopole du bien, mais pousse la chose plus loin en revendiquant le monopole de la santé mentale, en assimilant les résistances qu’il suscite à l’univers de la phobie. De la xénophobie à l’islamophobie à la transphobie, et on pourrait ajouter d’autres phobies à la liste, on comprend que toute forme d’attachement marqué à ce qui se passe pour le monde d’hier relève désormais du désordre psychique. (p.  33)

Diane Lamonde :

Il est clair que, pour Meney, le nationaliste aura toujours tort,  quelle que soit la mouvance à laquelle il appartient : «Au Québec, écrit-il, il existe deux types de nationalisme, l’un francophile, l’autre francophobe. (p. 78)

Benoît Melançon :

Après nous avoir entretenu d’anglicismes et de tics langagiers (notamment de l’immigration qui est toujours massive), il nous recommande la lecture d’une bande dessinée : La sémantique c’est élastique. Dans l’ouvrage, on trouvera un néologisme : le phobophobe, celui qui a peur d’avoir peur.

Vendredi phobique.

Je propose le néologisme suivant : la métaphobie.

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Mise à jour du 26 juin 2019 :

Une bonne recette. Ajoutez un zeste d’écoanxiété à la phobophobie :

Qui parcourt les titres de la presse internationale finira inévitablement par tomber à quelques reprises sur un nouveau concept, qui désigne une forme inédite de panique psychologique : je parle du concept d’écoanxiété. L’écoanxiété frappe ceux qui, pour une raison ou pour une autre, sont à ce point dévastés par le sort de la planète qu’ils en viennent à se laisser abattre par cette possibilité.

Mathieu, Bock-Côté, Génération surangoissée, Le Journal de Montréal, 26 juin 2019

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Références :

Bock-Côté, Mathieu, L’empire du politiquement correct : essai sur la respectabilité politico-médiatique, Les Éditions du cerf, 2019, 298 p.

James, La sémantique c’est élastique, Delcourt, collection Pataquès, 2019. 113 p.

Lamonde, Diane, Français québécois : La politisation du débat, Del Busso éditeur, 2019, 236 pages.

Melançon, Benoît : Entretien avec Antoine Robitaille, Là-haut sur la colline, 21 juin 2019

 

A propos Luc Jodoin

Effleure la surface des choses. Intérêt pour la littérature, la langue, les arts visuels, la sociologie et les enjeux sociaux. Tendance woke. Préfère Madrid à Barcelone.
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