Frédéric Beigbeder est triste. Il est las et déçu. Il n’a pas apprécié Bristol de Jean Echenoz. Que dis-je? Un navet, dactylographie-t-il, en tête de son œuvre de démolition soigneusement étalée sur deux colonnes dans Le Figaro Magazine du 3 janvier 2025.
Pourquoi, selon lui, ce roman fait-il partie de la famille des brassicacées ?
Il n’y a pas de véritable héros. En fait, le héros est un raté. Alter ego de l’auteur, sténographie-t-il. Ce n’est pas gentil.
Les personnages secondaires sonnent faux.
Il abuserait de la défenestration dans ses deux derniers romans.
L’omniprésence lassante de l’ironie.
C’est farci d’invraisemblances.
Il n’est pas dupe de ses stratégies narratives.
Il n’y a pas d’histoire.
L’absence de sens.
Une perte de foi en la narration.
C’est une entreprise de destruction du roman.
Le lecteur est semé.
Que dire? Je n’ai pas été semé à la lecture de ce roman. Les raisons de sa détestation ne m’ont pas effleuré, mais enjoué. Un plaisir renouvelé comme à chacune des lectures des livres de Jean Echenoz.
J’ajouterai qu’il s’égare quand il évoque la révolution ratée du Nouveau roman.
Ah bon ! Cet homme de lettres va m’obliger à balancer les noms de tristes figures. Claude Simon, Nathalie Sarraute, Michel Butor, Alain Robbe-Grillet, Samuel Beckett et Marguerite Duras seraient-ils de simples écrivassiers et écrivassières ?
P.-S. Une alerte pour les auteurs et les autrices de « Postromans ». Ce chroniqueur littéraire a aussi griffonné ceci : « Peut-on raconter une histoire quand on a détruit le roman? La réponse est non. C’est pour ça que David Foster Wallace s’est suicidé.»
La magie des inférences boiteuses.
***
Sur Bristol, voir aussi mes commentaire : ici et là et là-bas.
_______
Jean Echenoz, Bristol, Éditions de Minuit, 2025, [édition numérique]
Frédérick Beigbeder, Le navet de Jean Echenoz : Le nouveau roman du prix Goncourt, 1999, « Bristol » est une immense déception, Le Figaro Magasine, 3 janvier 2025. [Accessible à BAnQ sur la plateforme Eureka]